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Des questions de sécurité routière renouvelées

La remontée de la mortalité en France et dans plusieurs pays européens depuis 4 ans incite à poursuivre les travaux et méthodes tant sur l’identification des facteurs d’insécurité routière, que sur l’identification de populations cibles ou d’actions ciblées. Si l’enjeu alcool a été bien mentionné dans la Déclaration de Malte et si les usagers vulnérables sont à l’agenda politique et de recherche en Europe, l’enjeu des blessés graves a été porté récemment à l’échelle européenne (grâce notamment aux contributions du FERSI) et doit être encouragé à l’échelle de chaque pays.

L’analyse des accidents de la route, des traumatismes qu’ils impliquent et des moyens de les éviter ou de les amoindrir reste le coeur des recherches et des compétences de TS2. Les systèmes de sécurité active et passive destinés à protéger les usagers des 2RM (gilets airbags, colliers cervicaux, protection jambes) continueront d’être évalués, afin de tester leur efficacité et leurs bénéfices.

Le niveau de vulnérabilité des usagers de certains types de modes de déplacement, en particulier celui des conducteurs de 2RM demeure. D’autres populations d’usagers émergent, ou se développent (utilisateurs des EDP par exemple) du fait de la promotion de l’utilisation des modes doux dans les grands centres urbains. Les travaux sur l’analyse des risques accidentels des 2RM seront poursuivis et ceux des utilisateurs d’EDP seront développés (notamment avec le projet européen Pionners impliquant le LBA et le LMA). Le risque des conducteurs de 2RM et des usagers d’EDP en agglomération et le rôle de l’infrastructure dans leurs accidents seront particulièrement étudiés, ainsi que les scénarii d’accidents en ville impliquant des EDP, des 2RM et des cyclistes. Les traumatismes et les lésions observables pour les usagers de 2RM et les utilisateurs d’EDP seront étudiés.

Des travaux seront également menés sur l’évaluation des formations post-permis à destination des 2RM, afin d’analyser leurs contenus pédagogiques et mesurer leur impact sur l’accidentologie. Des actions de formation/sensibilisation à destination des conducteurs de 2RM seront également développées dans le cadre du Trauma Center de Lyon.

Concernant les autres usagers vulnérables que sont les piétons et les vélos, les travaux sur les détections et la prise en compte de ces usagers par les conducteurs se poursuivront. En lien avec les réflexions sur les VA, un focus portera sur la compréhension et l’anticipation du comportement des piétons à l’égard des VA, notamment en termes d’abaissement du risque perçu et des potentiels effets pervers sur les comportements des piétons.

Au-delà de la mortalité qui reste un sujet essentiel en matière de sécurité routière, l’enjeu des blessés graves est aujourd’hui mis à l’agenda de la recherche et des politiques de sécurité routière à l’échelle européenne. Un rapport du Fersi sur l’enjeu des blessés MAIS3+ a été remis à la Communauté Européenne en 2017 contribuant à pousser cette question à l’échelle européenne. Le département TS2 a participé à la rédaction de ce rapport. La qualification et la quantification des blessés graves seront poursuivies à partir des données du Registre du Rhône, des données de l'ONISR et des données d'hospitalisations nationales (PMSI). Des recherches sur les conséquences à long terme des accidents, que ce soit en matière d’impact sur la santé ou d’impact sur la qualité de vie, seront également menées.

Accélérer la prise en charge médico-chirurgicale constitue un enjeu majeur pour réduire la morbidité des victimes de la route. Ainsi, l'implication des Laboratoires de TS2 dans les projets Crisis-Lab (I-Site Future) et i-Safe, dont l'objectif est la prédiction de la sévérité des blessures pour optimiser l'organisation de la chaine des secours, contribuera également à faire progresser les questions de prise en charge des blessés graves.

Il s’agit également de mieux comprendre les enjeux économiques des blessés à court, moyen et long terme, mais aussi la prise en charge de l’accidenté, l’ergonomie du handicap, et la mobilité des personnes en situation de handicap, afin de préserver leur participation sociale. Concernant plus particulièrement la mise en valeur de l’enjeu des blessés de la route, et en s’appuyant sur les travaux en économie de la santé, une méthode de valorisation socio-économique de la morbidité dans le cadre du projet M-Vasem sera développée et appliquée.

Une des raisons de la remontée de l’accidentalité routière dans certains pays (Allemagne, Belgique, France, Pays-Bas) depuis 4 ans, serait un relâchement dans le respect des règles. Cela reste toutefois à démontrer. Or, malgré l’acuité de la problématique et la concentration de la communication institutionnelle sur la nécessité de se conformer aux règles routières, il y a finalement peu de travaux actuellement sur ce qui fonde cette conformité et les moyens de l’améliorer. La perspective de l’arrivée des VA permet également de questionner autrement des aspects classiques de la sécurité routière, comme ce rapport à la règle. En effet, la question se pose des effets des VA sur le code de la route : va-t-il falloir réfléchir à des nouvelles règles dans cette nouvelle configuration ? D’autres règles deviennent-elles obsolètes ? Plus généralement, se pose la question du rapport aux règles : les capacités de réaction de l’intelligence artificielle dans les situations vont-elles avoir un impact sur le comportent des usagers ?

Ainsi, les travaux menés sur les facteurs psychosociaux explicatifs du rapport à la règle seront poursuivis, en interrogeant notamment l’effet de la perception du risque de se faire contrôler et la valorisation de la transgression, la représentation des règles routières et du système de contrôle-sanction. Il s’agira également de réfléchir aux types d’informations à fournir aux usagers pour améliorer la compréhension et la conformité aux règles et aux moyens d’augmenter cette conformité par des incitations positives plutôt que par des sanctions. Enfin, les travaux interrogeront les relations entre les différents systèmes normatifs (sociaux et institutionnels) et le rapport aux règles routières, aux incivilités (dans les transports notamment), aux lois et aux institutions, la conformité en tant qu’usager et en tant que citoyen.

En accidentologie, plusieurs difficultés sont identifiées en matière d’impact de la consommation d’alcool : la plage temporelle exacte entre le moment d’absorption d’alcool, le moment de l’accident et celui de la mesure. Indépendamment du taux mesuré, si la mesure est effectuée en période montante ou période descendante du taux d’alcool dans le sang, l’effet peut être différent. Toutefois, bien que les taux d’imprégnation alcoolique relevés soient largement supérieurs au niveau toléré par la réglementation, pour des raisons éthiques il n’est pas possible d’envisager des expérimentations avec des taux aussi élevés, ce qui reste un verrou méthodologique. Par ailleurs, de nombreux facteurs ont un effet sur la mesure (prise de nourriture avant la mesure ou pas, moment de l’absorption…) et il reste un certain nombre de lacunes concernant les effets combinés de faibles doses d’alcool avec d’autres facteurs (fatigue, durée de conduite, complexité de l’environnement, expérience de conduite, âge, etc…). Une nouvelle direction de recherche consiste à identifier les combinaisons de facteurs physiologiques et comportementaux qui permettent d’identifier que le conducteur a un taux supérieur ou égal à 0,5 g/l et de développer ainsi un système de détection qui remplacerait les interlocks. L’agrément alcool est redemandé par le LMA pour le simulateur de conduite de Salon-de-Provence et sera valable pour une période de 7 ans. Il permettra notamment d’aborder les verrous cités précédemment.
La recherche Actusam sur l’impact de l’alcool sur les accidents de la circulation a permis de mettre en évidence que la part de l’alcool dans les accidents mortels est restée la même malgré le renforcement des politiques répressives. Il y a donc un intérêt évident à poursuivre des études pour actualiser les données dans certains cas. Ce qui est vrai pour l’alcool, l’est également pour les drogues et les médicaments. Les travaux effectués sur l’alcool peuvent être effectués sur les substances licites et illicites, dans le respect de la réglementation en la matière.

En conclusion, bien évidemment ces quatre enjeux ne sauraient à eux seuls résumer les travaux qui seront réalisés sur les facteurs de risques. Il en va ainsi des questions liées à l’infrastructure et au réseau routier (à analyser avec le département Ame). La question du maintien en l’état du réseau viaire et des ouvrages est en effet une question importante pour la sécurité routière (La catastrophe de Gênes en est hélas une très bonne illustration), même si elle n’est pas traitée directement au sein de TS2.
Les routes secondaires doivent en particulier être mieux prises en compte et mieux connues. Au niveau du département, les bases de données S-VRAI (Cf. Axe 5) sont un élément important à exploiter pour mieux comprendre l’état du réseau départemental et son impact sur la quantité d’incidents repérés. Cette question est d’autant plus cruciale que cette partie du réseau est plus à risque d’accidents graves et sera difficilement pris en charge par les VA (difficultés envisagées sur la cartographie, le guidage au sol, les amers pour le positionnement, les connectivités véhicule-infrastructure, etc.).

Il en est ainsi également des phénomènes distractifs, que TS2 interroge depuis de nombreuses années au travers du téléphone au volant. Au-delà de la question déjà évoquée de la reprise en main du VA, les activités liées aux smartphones se développent, au volant ou chez les piétons, pour le loisir ou le travail. Il faut ainsi comprendre à quel point ces tâches annexes perturbent l’activité de conduite et la marche et quels moyens peuvent être mis en place pour qu’ils ne freinent pas la capacité de l’usager à gérer la situation.